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NOTRE SÉLECTION DE POÈMES : Ghyslaine LELOUP

LA PAIX DISENT-ELLES
LA GUERRE FONT-ILS


Nous avions maquillé nos yeux pour contempler le ciel
Et rougi nos lèvres de grenades pour embrasser la terre
Nous avions arrondi nos ventres pour honorer le monde

Les oiseaux se sont tus
Ô silence des déserts rendus plus arides
Sous l'acharnement des chars
Que reste-t-il sous la cendre ?
Nous cherchons les chemins, les champs
Dévastés par les bottes

Nos yeux sont cernés de deuil, nos jardins de décombres

Nos sexes ont été fouaillés au nom des frontières
Nos bouches souillées
Nos ventres ont accouché d'enfants traîtres

Ô paix abandonnée aux ronces
Mariée couronnée de la fleur d'oranger
Laissée blanche dans un cortège funèbre
Nous demeurons tes filles d'honneur
Et
Nos voix continuent d'élever leurs chants au milieu des salves
Nos pieds continuent de fouler la terre gorgée de sang

Nous nous vêtirons à nouveau pour les noces
Nous nous parfumerons à nouveau de jasmin
Nos maisons s'ouvriront à nouveau au voyageur

L'écho de nos incantations poursuivra notre légende

Ghyslaine LELOUP


COMBIEN DE FOIS NAIT-ON ?


Ils tentent de briser mon corps

Ils ont tant de fois tenté d’effacer ma mémoire
Tant de fois broyé mon corps
Ployant sous l’anathème
Leurs mots lacéraient ma chair autant que leurs pierres

Je sais les deux

L’obscurité du temps n’y fera rien
Pas plus que leurs souillures
Une lumière d’un autre ordre
Brûle
Intacte dans ma chair peuplée de voix

J’ai trois mille ans
Mariage blanc sur une faille d’encens
Prophéties criées de dieux supposés
Les hommes m’exilent loin des vivants

Venant d’en bas
Les cris

Toujours les cris

J’ai deux mille ans
Épouse des aubes de granit
Répudiée des chênes et des solstices
Le gui éteint son or au seuil de la raison

J’ai deux mille ans ailleurs
Repentie à la chevelure parfumée
Ils me disent la putain de l’autre
Celle qui danse sur des paroles inouïes
Et baise ses mains sans entraves

Depuis mille ans dans leurs cathédrales
Vierge définitive ou catin repentie
Ils ont gelé mes courbes dans des plis de stuc
Ourlé ma bouche de marbre

Voix envolée cris d’hirondelles
Arc du corps traduction des ailes

Venant d’en bas
Les cris

Silhouette furtive des futaies
Mes élixirs guérissent on me dit maléfique
Ils me fouettent me fouaillent me forcent et m’étouffent
Avant le bûcher et son orgie de ténèbres

Toujours les cris

Musique condamnée jusque dans les cages
Le glas de la prière tombe comme nos larmes
Traquée dans un orient aux fontaines taries
Je porte ma prison en un voile tissé lourd
Ciel obscurci sous les barreaux de mon regard

Les étoiles se taisent la lumière s’achève

Mais revient aujourd’hui et sa promesse de clarté

L’obscurité du temps n’y fera rien
Pas plus que leurs souillures
Une lumière d’un autre ordre
Brûle
Intacte dans ma chair peuplée de voix

Le jour se lève
Je rejoins la prochaine aurore

Ghyslaine LELOUP

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