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NOTRE SÉLECTION DE POÈMES : Claudia CARLISKY

Les corbeaux menacent encore le ciel.
De quel chemin de croix me parlent-ils ?
De quel sommeil aux songes pourpres
M'annoncent-ils l'expiation ?
Ou d'un linceul propitiatoire
Le baiser perfide et fallacieux de l'abandon ?
Palpitent et pépient, pépites dans mon lit
Se lient et me délient de tout délit commis.
Palpite sans raison mon cœur à l'unisson.
Le champ du ciel obscur s'ouvre enfin,
Et du songe noir et rouge, de l'onde,
Sort l'étendard blanc et jaune et bleu de ciel.
De l'azur nous toucherons la transparence
Et dans l'ordre des choses retiendrons l'immanence.

Claudia CARLISKY Poétesse et peintre argentine
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Paris, le 22 juin 1989


Les mots,
L'haleine engoncée dans la serrure d'une porte
Comme une aube récalcitrante, je promène mon œil hagard
ouaté d'éclats de sel de la mémoire.

Claudia CARLISKY Poétesse et peintre argentine
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le 21 juin 2008

L'EAU DES SONGES

Sempiternelle, l'onde, brisée puis recouvrée, éternel gazouillis, giclée jaillie d'une brisure dans la roche, faille entaillée laisse couler bouillonnements d'aurore. Une déchirure irruption de l'arbitraire un phare braqué dans l'œil. Hébétude balbutiante, des lambeaux de chair palpitante encore dans ton giron béant ; sucée rapide tout est en place. Nappe à carreaux rouges et blancs, feinte amidonnée de l'habitude, gommées les nacres et les coraux, désossés les songes, alambiqués les rêves d'horizons diaphanes, boursouflées les chairs chéries, affaissées et pantelantes, désaxés les gestes, maltraités les mots, vrillés au plus profond, cachés, malades, désavoués. Irruption calibre dix mille ouates de l'arbitraire point aveugle, au centre, le tourbillon volubile éteint, muet, calfeutré, blessé, livide, gauchi, apeuré. Sur cette terre d'absence une indicible usurpation, l'identité ravie, la faille se creuse, la béance s'agrandit, l'irrémédiable erreur faite comme par mégarde, le pied broie la main de l'enfant sous son poids de certitudes. Les plaques s'éloignent, l'intensité de la lumière vrille l'œil, assourdit la volonté hébétée, le cœur palpite, l'eau du corps coule, coule, déserte, assèche, corrompt, polluée, en flaques d'absence se répand dans le sable qui l'absorbe. Entame, le temps tombe en morceaux. Les flèches dards ruissellent pures étamines, éclats d'ardeur recomposée, cinglant à travers ciels, assoiffées d'éternel, avides, ailes vives, avancent radars lancés fulminant d'étoiles comètes pourpres, paillettes iridescentes. Trompe l'œil. Etonnement, désaveu, la mue rend muette. Clame l'innocence. Eloignement involontaire. Comme agie, agitée, marionnette, absence. Les pas dans tes pas. Reviens. Prends place et grandis. Agis. Marche. Ample. Murmure. Chante. Le temps. Reprends place dans le temps. Reprends ta place dans le cours du temps. Dans la cour des grands. Exténuée.

Des mots lâchés pour serrer au plus près le tourbillon qui va.
Des saveurs assoiffées de réel. Des ponts sur l'absence. Cerner. Entendre. Entendre. Reprendre l'essentiel. Suivre. Suivre à la trace. Contraindre. Craindre. Contempler. Au-dedans. Silence. Au-dedans. Espace. Au-dedans. Détachement. Accueil. L'œil écoute. Sans alibi. Salive. Mots qui se pressent. Et dansent. Tourbillon de sens. Irruption. Le temps presse. La tectonique des plaques. Dessin sans dessein. Le temps presse.
Allègement, désobéissance, hallali. Balbutiement, indifférence, hallali. Trahison, concupiscence, hallali. Désossés les songes, désorientés les rêves. Reprenons.
L'île, l'eau sourd, les vagues s'abandonnent sur la rive en petits rubans d'écume bleutée. L'innocence est silence. Le silence est piété. Visage de lune. Visage rosi par le soleil couchant. Langues de feu se miroitant dans la pénombre de ta joue. Source. Visage aigu et rond tout à la fois, ouvert par un rire éclatant. Lune de sang. Lèvres vermeilles effilées en un sourire éclair. Blondes joues duveteuses. Bienvenue sur la terre, Lumineuse. Bienvenue géante intime. Large confiance.
Complaisance. Complaire. Complaire. Le rire ne peut complaire sans précipiter la vérité. Le rire est vérité.
Tourner autour de cette couleuvre jusqu'à lui tordre le cou. Focus. Faux cul. Flou. Flouer. Faire éclater les faux-semblants. Ardeur/complaisance. Pas de retour. Pas d'alentour. Aller au but. Droit au but. Le vent ne peut être pris en cage. Phrase lue ce matin. Le vent ne saurait être mis en cage. Impossible. Sa nature l'en empêche. Elle ne le lui interdit pas. Elle ne le permet tout simplement pas. Qui peut coïncider avec sa nature ? Qui connaît intimement son essence pour décider à bon escient ? Qui ? C'est à travers l'autre, la substance, la matière, la cause, l'instrument que la nature intime se dévide, se dit, s'énonce sans marquer, sans souligner, elle éclate selon sa nature justement ; mais la nature n'est jamais livrée seule, elle prend toujours forme. Elle s'inscrit dans le temps, dans une durée, au cœur d'une durée. Le vent est souffle. Le souffle. Qu'est-ce qui fait de l'air du souffle ? La poésie est souffle. La pensée est souffle. La pensée liée à au rythme est souffle. Je m'égare. La poésie ne saurait être mise en cage. La pensée ne saurait être mise en cage.

Claudia CARLISKY Poétesse et peintre argentine
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LAISSEZ-MOI LA BEAUTÉ TUTÉLAIRE


Adieu lave. Un froissement sec.
Crépitement d'os.
Laissez-moi la libellule et mon collier de larmes.
Laissez-moi la beauté tutélaire et le naufrage.
Laissez-moi rire et laissez-moi pleurer.
J'ai mâché des larmes d'oubli.
J'ai grignoté la moelle de vos os endormis
Et j'ai craché des filaments séchés,
Des lianes filandreuses de fiel et d'agonie.
J'ai noyé et broyé, souillé et piétiné.
Et de ce mâchouillis infâme est né un égrégor
Fait de toutes les lames, miroirs de mauvais sorts,
M'en suis enduit le corps.
J'ai trépigné, psalmodié, attisé,
Arraché l'épaisse boue qui dénature.
En trouées de lumière, de mes sanglots enfouis,
Jaillissant comme un cri,
J'ai craché du lilas, du bleu, de l'amarante, des oranges solaires,
Des carmins cristallins, des bleus céruléens,
J'ai lavé les orgies, rougi les amnésies,
J'ai craquelé l'absence, étanché la souffrance,
Puis je me suis assise.

J'étais seule.

Claudia CARLISKY Poétesse et peintre argentine
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- 2000 -

LE SILENCE REVIENDRA SUR SES PAS


Par petites touches, j'arriverai au cœur des choses, là où la nature se désaltère.
Alors, peut-être oserai-je la fidélité. Alors, peut-être le silence me fera-t-il une place en sa présence.
L'armée des ombres, gardienne spéculaire, aplanira ses ailes et s'effacera.
J'aurai alors les trois étoiles pour guider mon regard et les deux lions pour diriger ma route.

Lorsque j'arriverai au cœur des choses, là où la ligne et le tracé ne font plus qu'un, j'oserai habiter le silence et pardonner aux signes leur incommensurable lenteur, ma torpeur et ma dette.

Lorsque je parviendrai au seul vouloir, oh oui lorsque je parviendrai au seul vouloir, là ou la route se fait étroite et le chant profond, là où le chant se fait aigu. Non pas grêle mais clair, le silence reviendra sur ses pas. Il surgira, intact. De cette enfance sans équivoque où les oiseaux ne craignaient rien.  

Claudia CARLISKY Poétesse et peintre argentine
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Née à Buenos-Aires en 1954 dans une famille d'artistes, elle grandit entre l'Argentine et la France où elle vit entre 4 et 15 ans. Adolescence mouvementée dans un pays sous la dictature.
Subjuguée par la danse, elle suit les cours de Marilu Marini qui lui propose de participer aux répétitions des «Bacchantes» d'Euripide qu'elle et Roberto Villanueva organisent dans les locaux du Théatre expérimental Di Tella. La pièce jugée trop subversive par le pouvoir en place ne verra jamais le jour.
Elle fréquente ensuite l'atelier du peintre Miguel Davila.
Installée à Paris en 1975, elle y poursuit l'exploration de ces diverses disciplines artistiques.
Elle s'initie à l'imaginaire gestuel, vocal et expressif dans l'Atelier de Théâtre de Jean-Gabriel Nordman.
L'intensité et la profondeur du travail des slow motions et improvisations de danse orchestrées par le danseur japonais Tanaka Minh ainsi que son fameux Laboratoire météorologique du corps, furent décisifs dans son évolution personnelle et picturale.
Le souffle, l'énergie et la passivité active, se sont retrouvés au coeur de sa démarche picturale et poétique et la danse est un des thèmes récurrents de sa peinture.
Traductrice (Pablo Poblete) peintre et poète, elle a publié en français plusieurs livres :
• Idéogramme amoureux (2001)
• J'accuse, édité par les Ateliers Betsalel, 2000
• Incantation. Lilas de tes blessures, édité par les Ateliers Betsalel, 1994
• Les Mille miroirs se découragent, édité par les Ateliers Betsalel, 1994
• Concerto pour un visage, édité par l'UAPA (Union des Artistes Plasticiens Argentins), 1992
ainsi qu'une publication bilingue dans l'Annuaire hispanoaméricain de Poésie, « Aerea », Santiago du Chili – Buenos Aires, 2002 et de nombreuses publications dans des revues.
Une quinzaine de récitals de Poésie dont quatre avec le flûtiste Craig Goodman, l'altiste Dimitri Khlebtsevitch, et le violoncelliste Igor Kiritchenko formant le Trio Goodman
et un récital au Centre Maayan dans le cadre du Printemps des Poètes avec le harpiste Julien Marcou et la poète uruguayenne Ingrid Tempel en 2007.
Enfin, comme peintre,elle a participé à 25 expositions individuelles et collectives en France, Suisse, Italie et Allemagne depuis 1983.
La dernière, réunissant 13 artistes argentins, a eu lieu en juin et juillet 2009 aux Temps du Corps, à Paris.
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Poèmes publiés sur le site internet lemanoirdespoetes.fr